Etre handicapée et avoir un enfant : le règne de la débrouille
Beaucoup de femmes handicapées souhaitent être mères. Cela est souvent possible, mais pas toujours simple… Heureusement, quelques initiatives ont vu le jour pour aider ces femmes.
Pendant longtemps, la société a vu d’un mauvais oeil le fait que des femmes handicapées puissent être mères. La situation évolue aujourd’hui un peu plus favorablement, "mais la parentalité ne représente toujours pas une priorité de la société ni même des associations de personnes handicapées", explique Delphine Siegrist journaliste, elle-même handicapée, et auteur d’un ouvrage sur ce thème*.
Pas forcément des grossesses à risque
Aucune aide spécifique n’est
d’ailleurs prévue pour aider les mères handicapées à s’occuper de leurs bébés. Même si les gros centres hospitalo-universitaires ont l’habitude de recevoir des femmes handicapées, il n’existe pas
non plus de maternité prenant spécifiquement en charge ces femmes en France, à l’exception de quelques lieux. Ainsi, l’hôpital de la Salpétrière à Paris a développé une expertise dans l’accueil
des femmes malentendantes.
Mais, il est vrai que la grossesse
des femmes handicapées, même blessées médullaires, n’est en général pas à haut risque. Elle ne nécessite pas un suivi dans une maternité spécialisée dans les grossesses à risque, même si elle
comporte des aspects spécifiques. Chez les femmes paraplégiques et tétraplégiques, il faudra ainsi par exemple veiller tout particulièrement au risque d’escarres et d’infections urinaires,
effectuer une péridurale et, en cas de lésion médullaire haute, prévoir
une césarienne pour l’accouchement.
Tout prévoir dans les moindres détails
En pratique, il est préférable lorsque l’on est handicapée d’organiser sa grossesse. En cas de handicap moteur, "il faudra penser à prendre rapidement contact avec son médecin rééducateur" conseille Delphine Siegrist, "Celui-ci connaît en général bien mieux le handicap que les obstétriciens et il pourra aider ces derniers à prendre en charge cette grossesse un peu différente". Autre priorité : trouver le professionnel de santé qui vous suivra et choisir l’établissement où accoucher. Ce n’est pas toujours évident car il n’existe pas de document officiel recensant ces données. "De plus, beaucoup de maternités demeurent difficilement accessibles aux fauteuils roulants et peu de gynécologues disposent de tables élévatrices pour examen gynécologique, indispensables chez beaucoup de femmes en fauteuil" ajoute Marjorie Nibbio, mère handicapée motrice d’un petit garçon de 3 ans et demie et présidente de la nouvelle association ADAPPH destinée à aider les parents et les futurs parents handicapés. De fait, une enquête entreprise en 2002 par la Mission handicap de l’Assistance publique de Paris a montré que sur 59 maternités d’Ile-de-France, une vingtaine seulement se déclaraient capables de suivre une femme handicapée dans le cadre d’une grossesse. Sur 1 757 cabinets de gynécologie dans la région, 156 étaient accessibles aux femmes en fauteuil roulant et 36 disposaient de table d’examen élévatrice...
Les femmes handicapées ne devront donc pas à hésiter à demander à visiter leur future chambre à la maternité pour vérifier qu’elles peuvent s’y déplacer sans problème et que le personnel est apte à les recevoir, car les maternités sont souvent mal adaptées aux fauteuils roulants et électriques et le personnel n’a pas l’habitude de gestes comme les sondages urinaires.
Quelques initiatives locales pour épauler les familles
Quelques associations permettent cependant de briser l’isolement des femmes handicapées et la culpabilité qu’elles ressentent souvent à vouloir être mères comme les autres femmes, "culpabilité qui est renforcée par la crainte encore persistante de certains professionnels de santé vis-à-vis de cette démarche et parfois par une hostilité de la population à voir des femmes handicapées être enceintes" indique Marjorie Nibbio.
Voir aussi : |
L’essentiel sur le handicap Faites valoir vos droits ! Vie quotidienne La recherche face au handicap |
Une nouvelle association pour les futures mamans handicapées : l’ADAPPHL’ADAPPH (Association pour le Développement de l’Accompagnement à la Parentalité des Personnes Handicapées) rassemble à la fois des parents et des professionnels de santé et a pour principal objectif de développer l’accompagnement à la parentalité des personnes handicapées physiques et sensorielles. Un accueil téléphonique (le lundi, mardi, jeudi et vendredi, de 9 heures à 11 heures et de 14 à 16 heures : 04 76 22 86 89) est prévu pour les couples qui souhaitent des renseignements et on trouve sur le site internet de l’association (www.adapph.org) un recensement précis des initiatives locales développées dans le domaine de la parentalité des personnes handicapées, dans chaque région de France. A terme, l’ADAPPH espère encourager la mise en place d’autres initiatives régionales en s’inspirant de celles déjà existantes. Dès 2006, des rencontres-débats devraient être organisées par l’ADAPPH dans la région grenobloise. Les thèmes abordés lors de ces rencontres concerneront l’organisation de la vie quotidienne avec un enfant quand on est parent et porteur d’un handicap. Comme l’explique Marjorie Nibbio, "chaque parent confronté à une difficulté ou face à une interrogation peut soumettre sa problématique par le biais du site internet de l’association, et ainsi proposer un nouveau thème de rencontre-débat. Par ailleurs, un forum est à disposition des parents sur le site de l’association. A l’issue de cette rencontre, un résumé sous forme de dossier sera publié sur le site internet, et sera ainsi accessible à chaque parent adhérent à l’ADAPPH quel que soit son lieu d’habitation". |
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