Féminicides: en France, 79 femmes ont perdu la vie en raison de violences conjugales depuis le début de l'année
Féminicides, c'est le mot qui qualifie les meurtres ou suicides forcés de femmes parce que précisément, elles sont femmes. RFI vous propose des témoignages victimes de ces violences, en France et dans d'autres pays. Selon le collectif NousToutes, en France, ce sont depuis le début de l'année 2023, 79 femmes qui ont perdu la vie en raison de violences conjugales. L'année dernière, 147 femmes sont ainsi décédées. Ni les femmes ni les enfants ne sont suffisamment protégés alertent les acteurs de ce dossier.
Publié le : 14/08/2023 - 07:31
Modifié le : 14/08/2023 - 07:36
4 mn
En France, selon le collectif «Nous toutes», 79 femmes ont perdu la vie sous les coups de leurs maris depuis le début de l'année 2023.
En France, selon le collectif «Nous toutes», 79 femmes ont perdu la vie sous les coups de leurs maris depuis le début de l'année 2023. © Getty Images/Tinnakorn Jorruang
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RFI
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Victimes de violences conjugales dans le huis clos de leur domicile, elles sont nombreuses à ne pas oser partir, encore moins porter plainte contre leurs bourreaux.
Anissa, 43 ans, a failli faire partie de ce sinistre décompte. Il y a un peu plus d'un an, elle a échappé à la mort en s'enfuyant de son domicile. Suite la plainte que la mère de famille a déposé, son ex-compagnon est emprisonné. Aujourd'hui Anissa tente de se reconstruire, et à chaque nouveau cas de féminicide, elle mesure la « chance » qu'elle a d'être vivante.
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Déposer une plainte ne met pas à l'abri du danger
Le 21 juillet dernier, Hadjira a été tuée par son mari. Trois mois plus tôt, elle avait déposé une plainte contre lui. Par peur des représailles, elle avait aussi fait une demande d'ordonnance de protection en attendant le jugement. Une demande rejetée par le juge des affaires familiales qui avait estimé « qu'aucun élément ne venait étayer un réel danger » pour cette mère de deux enfants. Pour l'avocate Isabelle Steyer, spécialisée dans les violences conjugales, c'est justement au moment où les femmes victimes de violences déposent plainte qu'il faut les protéger, puisque le risque d'être tuée augmente. Elle est interrogée par Candice Mazaud-Tomazic de RFI. « C’est bien quand elles font toutes les démarches qu’elles sont encore plus en danger, puisqu’elles dénoncent la violence de cet homme-là.
C’est à ce moment-là qu’elles risquent de mourir et c’est à ce moment-là qu’elles ne sont pas protégées. Il faut une protection à cent pour cent de ces femmes, c’est-à-dire qu’à partir du moment où elles déposent plainte, il faut savoir qu’elles sont en danger. Il faudrait systématiquement les protéger à partir de ce moment-là. Le bracelet anti-rapprochement avant une décision de condamnation devrait être donné à toutes les victimes, et le juge des libertés devrait pouvoir l’attribuer aux hommes violents et le juge aux affaires familiales devrait pouvoir l’attribuer aux hommes violents sans recueillir leur accord, de façon systématique, alors même qu’une plainte est déposée pour des faits de violence conjugale. »
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Faut-il suspendre l'autorité parentale de l'agresseur ?
Comment se reconstruire et tenir éloigné un compagnon violent lorsque la garde des enfants est toujours partagée ? C'est l'autre volet du combat contre les féminicides. Les associations d'aides aux victimes se battent pour que l'autorité parentale revienne exclusivement à la mère en cas de violence par le père. Aujourd'hui, même en cas de séparation, ou d'incarcération, un mari ou un ex-compagnon violent envers sa femme peut conserver l'exercice de l'autorité parentale, obligeant la victime à rester en contact avec lui. Selon les associations, il est urgent de suspendre l'exercice de cette autorité pour l'agresseur, cela permettrait dans certains cas d'éviter le pire...
À la Fédération nationale « Solidarités femmes », les témoignages ne manquent pas de ces pères violents qui continuent à faire la pluie et le beau temps dans la vie quotidienne de leurs enfants - même à distance -, en s'opposant par exemple à ce qu'ils participent à une sortie scolaire ou à ce qu'ils accèdent à un suivi psychologique. Sa directrice, Françoise Brié, milite donc pour que cette autorité soit exclusivement confiée à la maman, mais également pour que le conjoint ne puisse obtenir - en plus - les droits de visite et d'hébergement. Elle l'explique au micro d'Amélie Beaucour de RFI : « Comment un auteur de violences peut obtenir, par une décision judiciaire après la séparation, le droit de recevoir ses enfants au domicile, les week-ends, la moitié des vacances scolaires, voire plus ? Et comment il va, à travers ces droits de visite et d’hébergement, continuer à harceler, et à commettre des actes de violence, par exemple au moment de la remise des enfants, mais aussi pire, c’est-à-dire faire souffrir les enfants pour arriver à atteindre l’ex-compagne. »
Lorsque le pire n'a pu être évité, la suspension n’est pas automatique si bien que certains enfants continuent à être sous l'autorité de l'homme qui a tué leur mère.
https://www.rfi.fr/fr/france/20230814-f%C3%A9minicides-en-france-79-femmes-qui-ont-perdu-la-vie-en-raison-de-violences-conjugales-depuis-le-d%C3%A9but-de-l-ann%C3%A9e?utm_medium=social&utm_campaign=twitter&utm_source=shorty