Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de hugo,

Diversité, handicap, seniors... Peut mieux faire

1 Novembre 2012, 02:05am

Publié par hugo

Le Point - Publié le 21/10/2010

Ethique. Les entreprises progressent, mais cela prend du temps ! 
Spécial Recrutement

  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Sur le même sujet

BNP Paribas condamnée à 350 000 euros pour n'avoir pas redonné son poste à une mère de famille après un congé parental, Airbus à 18 000 euros pour n'avoir pas recruté un technicien en raison de son origine... Discriminer coûte cher. De plus en plus cher. Mais surtout, au-delà de la sanction pénale, il en va de l'image de l'entreprise auprès de ses salariés, de ses clients et de ses partenaires commerciaux. Car le regard a changé...

Ou tout au moins les paroles ! Car si tous les grands groupes en font un cheval de bataille, pour de bonnes et mauvaises raisons - coller à l'évolution sociologique de la société, motiver les équipes, échapper aux sanctions... -, les résultats restent en deçà." Il existe un déséquilibre manifeste entre l'engagement général des grandes entreprises en faveur de la diversité et la traduction de cet engagement en actions concrètes ", note le rapport Deloitte commandé par Eric Besson, ministre de l'Immigration. Des freins de tous ordres persistent : des objectifs peu ambitieux, des discussions longues avec les partenaires sociaux, l'impossibilité parfois de trouver la personne compétente pour le poste, des limites budgétaires, l'absence de suivi... Le sujet n'échappe pas non plus au mal très français consistant à débattre pendant des mois de la méthode, de la fiabilité de tel ou tel indicateur, tandis que le temps passe, renvoyant l'urgence et le bien-fondé de l'action à plus tard... Résultat : des initiatives louables, mais encore trop ponctuelles et diverses selon les types de discrimination.

Diversité ethnique. C'est la discrimination dont on parle le plus, celle sur laquelle la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) est le plus saisie : 28,5 % des réclamations en 2009. C'est celle aussi sur laquelle les initiatives sont sans doute les plus nombreuses. Mais on part de loin, de très loin. Alors que la proportion d'immigrés diplômés est désormais proche de celle des non-immigrés, le taux de chômage des premiers est le double de celui des seconds. Même chose pour les jeunes vivant dans les zones urbaines sensibles. Car " à la discrimination liée au nom vient s'ajouter celle attachée à l'adresse ", relève le rapport Deloitte. Les recruteurs jouent la sécurité...

Pas tous, heureusement ! 71 % des entreprises interrogées par la Halde disent avoir travaillé à des procédures de recrutement plus objectives. Le CV anonyme en est une. Une loi de 2006 avait prévu de le rendre obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés, mais, faute de décret, l'obligation s'est transformée en expérimentation. Axa l'utilise pour le recrutement de 20 % de ses commerciaux, Casino pour 1 500 emplois dans ses magasins (chefs de rayon, hôtesses...). Mais aussi L'Oréal, Accor, PSA, Auchan, BNP Paribas... Eric Besson attend les conclusions du rapport prévu en janvier pour décider ou non de sa généralisation. En Europe, l'Allemagne est également en train de le tester. Seule la Belgique l'a rendu obligatoire.

Les entreprises essaient également d'aller au-devant des candidats : plan Espoir banlieues, Train de l'égalité des chances...

Mais la discrimination n'est pas seulement à l'embauche. Elle est sensible dans la gestion de carrière. De manière beaucoup plus insidieuse et par conséquent difficile à combattre. D'où les formations des managers à la diversité délivrées par les sociétés telles que BNP Paribas, Axa, L'Oréal, La Banque postale...

La prise de conscience est réelle mais lente. 2 900 entreprises, dont 70 % de PME, ont signé la charte de la diversité lancée en 2004 par Claude Bébéar, l'ancien président d'Axa, et Yazid Sabeg, l'actuel commissaire à la Diversité et à l'Egalité des chances. 800 depuis le début de l'année. Un salarié sur cinq (3,4 millions sur un total de 15,8 millions) peut ainsi espérer ne pas être discriminé. C'est bien, mais l'arbre cache encore la forêt et la crise n'arrange rien. 68 % de ces entreprises censées donner l'exemple ont avoué ne pas avoir mené d'actions en 2009.

Handicapés. C'est la discrimination qui régresse le plus. Et la loi y est pour beaucoup. Depuis 2005, toute entreprise qui n'emploie pas 6 % de salariés handicapés doit verser, selon sa taille, une amende de 3 500 à 5 300 euros par salarié manquant et, si aucun salarié n'a été recruté au cours des trois dernières années, une pénalité de 13 000 euros (1 500 fois le smic horaire) par emploi manquant. Une politique du bâton qui s'est avérée payante." Depuis 2006, le nombre d'entreprises qui versent une contribution à l'Agefiph [Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées] a baissé de 13 %, passant de 58 500 à 50 700, et le montant des fonds collectés de 604 à 540 millions d'euros (- 10,5 %), commente son directeur général, Pierre Blanc.Mieux encore, sur les 26 000 qui en 2006 n'employaient aucun salarié handicapé, il n'en reste plus que 1 088 et sur les 50 700 qui depuis 2007 cotisent à l'Agefiph, 10 000 paient la sur-contribution. " Surtout, plus de 42 % des entreprises françaises satisfont au critère des 6 %.

Parmi les entreprises récalcitrantes, il reste néanmoins du chemin à faire. Le taux d'emploi moyen des handicapés chez elles ne dépasse pas 1,5 %." Nous gagnons 0,1 % par an, ce qui génère l'embauche de 9 000 personnes supplémentaires ", nuance Pierre Blanc. Ainsi, Sodexho, qui compte déjà 93 personnes handicapées, s'est engagé d'ici à 2011 à recruter 200 nouvelles personnes, dont 30 agents de maîtrise et 6 cadres.

Rassurant !" Le frein principal à l'embauche de handicapés est l'inadéquation des compétences aux besoins des entreprises. Cela représente plus de 80 % de la difficulté, explique Pierre Blanc.Les handicapés sont moins qualifiés - 21 % ont le bac et plus contre 41 % pour l'ensemble de la population -, plus âgés - 34 % ont plus de 50 ans contre 16 % -, et sont au chômage plus longtemps - 50 % sont en longue durée. " D'où l'accent mis ces dernières années sur la formation avec Pôle emploi et les conseils régionaux." En 2005, 19,1 % des demandeurs d'emploi handicapés suivaient une formation ; en 2009, 37,7 %. "

Egalité hommes-femmes. L'écart de salaire entre les hommes et les femmes qui n'ont pas interrompu leur carrière est de 17 %, selon l'étude de Dominique Meurs, Ariane Pailhé et Sophie Ponthieux, chercheuses à l'Insee et à l'Institut national d'études démographiques. Et ce alors qu'elles sont plus diplômées : 19 % ont un niveau bac + 3 contre 17 % chez les hommes. Un écart difficile à justifier !" Seulement 30 % peuvent s'expliquer par un temps de travail moins long (moins d'heures supplémentaires) ou l'appartenance à un secteur moins rémunérateur ", expliquent ces dernières. Les inégalités commencent d'ailleurs dès l'embauche. L'écart pour les diplômés 2008 dépassait 10 %, selon la Conférence des grandes écoles. Et plus on monte dans la hiérarchie, plus les différences s'aggravent. Et pourtant, dès 1972 était affirmé dans le Code du travail le principe " à travail égal, salaire égal ". Un texte qui fut suivi d'une série d'obligations : en 1983, celle de communiquer au comité d'entreprise un rapport de situation comparée ; en 2001, la menace de sanctions pénales et de 3 750 euros d'amende pour les entreprises qui n'engageraient pas une négociation sur le sujet chaque année. Nouvelle tentative en 2006. Mais sans sanctions. Résultat : seulement 220 entreprises ont signé un accord d'égalité professionnelle et peu se sont fixé des objectifs chiffrés. C'est le cas néanmoins de Total, Société générale, Axa, HSBC, EDF, qui y affectent des moyens financiers. Hewlett-Packard France a débloqué par exemple 1 million d'euros sur trois ans pour réduire des écarts qui vont jusqu'à 7,3 %. La loi sur la réforme des retraites actuellement en discussion en remet une couche. Elle prévoit une pénalité égale à 1 % de la masse salariale en cas de non-signature d'un accord (voir p. 112).

Mais il n'y a pas que le salaire. On recrute moins de femmes. Peur qu'elles soient enceintes, moins disponibles en raison de leurs enfants... Les excuses sont légion. Seulement 10 entreprises au sein du CAC 40 se sont fixé des objectifs chiffrés en matière de mixité. Ainsi, Air liquide a pour objectif de passer en cinq ans de près de 33 % à 40 % de femmes dans les recrutements d'ingénieurs et cadres. Suez Environnement souhaite atteindre 20 % de femmes dans son effectif total et 26 % dans l'encadrement d'ici à 2012. BNP Paribas organise des journées de recrutement réservées aux candidatures féminines, France Télécom s'engage à ce que, pour les postes seniors, toute sélection de candidats n'intégrant pas des femmes soit remise en question par les services des ressources humaines. Près de la moitié des sociétés du CAC 40 ont mis en place, selon le baromètre 2010 de Capitalcom, des mesures pour concilier vie privée et vie professionnelle. Contre 28 % en 2008. BNP Paribas, France Télécom, PSA, Accor, GDF Suez ou encore Renault ont aménagé le temps de travail et développé des services de proximité tels que les crèches, une conciergerie, l'assistance à domicile pour garder les enfants malades... Alcatel Lucent, Michelin ont misé sur le télétravail.

Les femmes sont également moins nombreuses à accéder aux postes à responsabilité et au sommet du pouvoir. Elles représentent moins d'un tiers des effectifs totaux et de l'encadrement. Des chiffres qui, selon le baromètre Capitalcom, ont peu évolué depuis 2006 : 32,2 % des effectifs totaux en 2009 (30,9 % en 2008) et 29,4 % de l'encadrement (25,7 % en 2008). Sept groupes (LVMH, L'Oréal, Société générale, Lagardère, BNP Paribas, Crédit agricole et PPR) et trois pour l'encadrement (LVMH, L'Oréal et Lagardère) dépassent cependant la parité.

Au niveau du Comex, les femmes sont encore moins présentes : moins de 10 % (7,3 % en 2009 et 6,8 % en 2008) et tout juste 10 % dans les conseils d'administration (10,5 % en 2009 et 10,2 % en 2008). A tel point qu'un projet de loi actuellement en discussion souhaite instaurer un quota de 40 % dans les conseils d'administration d'ici à six ans.

Seniors. La France part de loin. Avec un taux d'emploi des personnes âgées de 55 à 60 ans de 48 % en 2000, notre pays était dans les derniers de la classe en Europe. Ce taux est progressivement remonté à 54,8 % en 2007 et à 60 % au deuxième trimestre 2010, selon les chiffres du secrétariat d'Etat à l'Emploi." La hausse s'explique en grande partie par la fin des pré-retraites, l'impossibilité de mettre un salarié à la retraite d'office avant 70 ans, l'obligation pour les entreprises de négocier un accord sur l'emploi des seniors, le développement du tutorat... ", explique Laurent Wauquiez. Pour aller plus loin, ce dernier compte sur l'allongement de la durée de travail et le dispositif d'aide à l'embauche d'un senior de plus de 55 ans qui va être mis en place parallèlement à la réforme des retraites.

Le ministre risque cependant d'être déçu. Seulement 6 % des grandes entreprises se déclarent prêtes à recruter un senior, 10 % estiment que le recul de l'âge de la retraite aura un impact favorable, 54 % qu'il sera neutre et 36 % qu'il sera négatif, selon une enquête Towers Watson.

L'entreprise est en effet partagée. Côté pile : leurs compétences, leur disponibilité. Côté face : leur coût en termes de salaires, de primes d'ancienneté, l'obligation de les former aux nouvelles technologies, aux nouvelles méthodes de management... Aussi, " les DRH adoptent une position défensive ", constate Olivier Parent du Châtelet, associé gérant de BearingPoint. Seulement un tiers d'entre eux a pris le problème à bras le corps depuis un an, et 66 % parce qu'ils y étaient obligés. A défaut d'accord, la pénalité pour les sociétés de plus de 300 salariés est en effet égale à 1 % de la masse salariale. Les syndicats ne sont pas non plus blanc-bleu. La CFE-CGC de BNP Paribas vient par exemple de réclamer au ministre du Travail la possibilité pour la banque de lancer un plan de départs pour les seniors. L'abandon en janvier de ce projet aurait freiné le turnover des effectifs, diminué le niveau de recrutement, complexifié l'intégration des salariés de Fortis et empêché ou retardé le départ à la retraite de salariés.

Mais les entreprises n'auront bientôt pas le choix. Elles devront s'adapter, car on travaillera à l'avenir plus longtemps. Mieux vaut donc être inventif. Rhodia a par exemple mis en place un tutorat inversé, dans lequel ce sont les jeunes qui forment leurs aînés aux nouvelles technologies. Le groupe chimique favorise aussi le cumul emploi-retraite de ses anciens salariés en leur confiant des missions de formation et d'expertise technique. Enfin, la direction a créé un congé grand-parental qui permet de basculer en temps partiel avec 80 % du salaire.

Ces quatre discriminations ne sont pas les seules. S'y ajoutent celles liées à l'activité syndicale, au physique. En 2009, la Halde a reçu 134 réclamations de personnes considérant avoir été discriminées sur leur apparence, et notamment leur surpoids. Et les entreprises sont loin d'être les seules coupables.

Alors, la solution ? Au-delà du changement du regard, elle passe en premier lieu par l'enseignement et la formation. Même lorsqu'elles le veulent, les entreprises ne trouvent pas toujours sur le marché les compétences dont elles ont besoin. Or c'est le nerf de la guerre." On n'embauche pas un jeune des banlieues, un handicapé parce qu'il a cette particularité mais parce qu'il ne correspond pas aux besoins de l'entreprise, expliquent les DRH.Nous ne sommes pas des philanthropes, même si nous aimerions individuellement l'être. "

Au niveau universitaire, le bilan est plus catastrophique encore. L'égalité des chances sur laquelle s'est bâtie la République recule. Et même si elles se multiplient, les initiatives restent marginales en nombre. On peut citer Sciences po, l'école de commerce de Lyon Idrac, qui vient d'intégrer gratuitement quatre étudiants de ZEP (zone d'éducation prioritaire) dans son Programme international grande école... Au congrès annuel des grandes écoles, Valérie Pécresse leur a demandé de faire évoluer leurs concours.

La formation des étudiants au management de la diversité reste également embryonnaire. Les initiatives se comptent sur les doigts d'une main. L'Essec a par exemple créé une chaire diversité et performance. De même que Paris-Dauphine. Un manque que les entreprises sont obligées de combler. Michelin vient de former 400 cadres à la diversité, L'Oréal 3 500... Auchan a mis en place une formation baptisée " Changer le regard sur le handicap " pour 6 000 de ses cadres, le Crédit agricole mise sur le théâtre... Reste la " bonne " éducation, qui, elle, ne se décrète pas.

http://www.lepoint.fr/economie/diversite-handicap-seniors-peut-mieux-faire-21-10-2010-1255702_28.php

Commenter cet article